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  • 23/06/2024 – De l’ennui

    Si aujourd’hui j’écris, c’est pour poncer une énième fois, sous vos yeux ébahis, la pierre déjà trop polie qu’est celle de l’ennui. Nous avons tous toujours quelque chose de mieux à faire, pour finir englués dans cette sorte de paradoxale immobilité que je vous vois imaginer pendant que je parle. Invraisemblable, mais les voies du Seigneur son impénétrables (cf les milliers d’années de débats qui sont loin d’être terminés).

    Cocteau a dit : il vaut mieux mieux une journée à ne pas produire un écrit de qualité plutôt que de rester à penser, pourvu qu’on écrire (La condition humaine). Alors me voici, époussetant mon torchon (lequel ? dirait ma professeure de concours ministériels) pour polir une deuxième catégorie de poncifs.

    L’ennui et l’envie, quel cliché !

    Dans l’ennui se retrouve fondamentalement un manque d’envie. L’envie me manque couramment – sauf celle d’aller me soulager. Je disais dans un précédent journal que l’écrit était vomi (08/04/2024 – Vomir dans le Thalys), dans le slam Strasbourg tu m’as saoulé que je prenais le merdier d’un endroit donné. Un psychothérapeute fatigué y verrait un lien qui dépasse le royaume des idées. Voici ce que j’en pense : « Comment creuser l’essence de l’existence quand on est par le spleen cloué au lit ? »

    Baudelaire prend souvent de grands airs – regardez un portrait et vous comprendrez que comme moi il n’avait pas d’autres choix. Il répond pourtant très justement à cette question : qui est sujet au spleen, à l’addiction, ou est ivre de quoi que ce soit d’autre, n’est pas en capacité d’écrire. C’est un temps qui vient après. Ah ! Encore un cliché. Il faut bien qu’on vienne s’assurer qu’ils soient dépoussiérés. Faute de balayer devant ma porte physiquement, je peux au moins le faire métaphoriquement.

    En attendant des jours plus captivants je finirais sur une histoire vraie – encore, cette fois-ci non pas dans le secondaire, mais au niveau universitaire.

    Un parcours universitaire : d’une licence arts plastiques à une licence lettres modernes

    L’art de retomber après un raté (de la réorientation)

    J’ai commencer la création avec le dessin, les arts, que je suis entrée à l’université pour étudié en licence arts plastiques. Finalement, ce ne sont pas que les résultats qui m’ont poussée à me réorienter, mais un sentiment d’inadéquation permanent. J’ai changé pour la licence Lettres modernes sans trop y regarder, ce qui n’aurait rien changé vu mon parcours après mon master études culturelles.

    Je trainais mon fantôme d’artiste raté comme un boulet. Après ma licence d’arts, je n’ai plus jamais dessiné quoi que ce soit qui soit digne d’intérêt. Tué, fusillé, j’errais comme une âme en peine avant de découvrir que je pouvais écrire.

    D’ailleurs, ça m’a beaucoup appris de me gourer : je remercie sans aucune ironie papa et belle-maman de m’avoir laissé foncer.

    « Les humanités, c’est pour les ratés »

    Comme si arts plastiques c’était déjà pas assez, en me voyant choisir une autre « filière chômage » (quelle blague, j’ai eu tellement de chômage que j’en ai fait un burn-out, regardez comme je suis incroyable ! ». Ah mais les humanités c’est bouchés, c’est pour les ratés. Comme si ça l’était pas à court terme pour ma soeur et ses confrères, qui ont refusé des contrats prometteurs… Mais eux ils font nucléaire, pas littéraire !, au moins ça donne ce que ma grand-mère appelait « une situation ».

    Retour à l’ennui (le tour des clichés)

    C’est pas grave, je suis un chat de gouttière, j’ai déjà une situation. Les réflexions je me les carre dans le fion, c’est bon pour le transit et ça me permet d’écouter, lire, pour mieux voir ce que l’on ne veut/peux dire pour mieux l’écrire.

    Lire aussi :
    Luba Jurgenson, Sortir de chez soi – Une lettre d’amour aux écrivains passeurs des textes
    09/06/2024 – Si je fleuris, traduis, écris, c’est grâce à mon sale caractère…
    29/07/2023 – Tribulations nocturnes à deux heures du matin

    L’ennui, part fondamentale du processus créatif

    Ce qui nous amène au fond de mon propos : l’ennui est primordial. Il est premier dans la création, l’écriture. Il permet d’ajouter de nouvelles cordes à son arc. Parfois il faut prendre de s’ennuyer pendant un projet, et débiaboliser le phénomène de la page blanche. Dans ces cas là, faites comme Virginia Woolf : marchez, lisez (Virginia WOOLF, Journal d’un écrivain, 10-18). Elle aussi intégrait de grandes périodes d’ennui dans son processus créatif, et c’est désormais une des plus grandes autrices en langue anglaise.

    Surtout, dans une société capitaliste qui nous demande d’être toujours plus productifs, d’effectuer un acte de rébellion qui parait inoffensif, mais reste pourtant fondamentalement nécessaire. Le contraire revient à vendre son art au capital.

    Si vous préférez, c’est ce qui vous faire dire quand vous écoutez un chanteur connu depuis un temps « c’était mieux avant« . Alors, bon sang, laissez leur le temps d’être fainéants !

    En tous cas, attendez moi ou pas, je continuerai à poncer.

    Barbara Ferreres, 2024, Tous droits réservés.

    Photo : Barbara Ferreres, 2024, tous droits réservés. Station de métro Bellecour à Lyon (panneau lumineux). Appareil photo numérique fujifilm XS-10 objectif fujinon 15-45mm, édité avec l’aide d’adobe lightroom, vaporgram et glitch cam (oui faut que je prenne des cours).


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    Marco de San Francisco

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    Marco de San Francisco

    C’était sur une route nationale de Bretagne 
    Sur ce chemin désert, sa mini grise comme la campagne 
    La conduisait vers une longue histoire.

     

    Elle était jeune, brune, jolie, grisée, 
    Il était quatre heures du matin 
    La lumière de ses deux phares, noyée dans l’illumination d’une intersection
    Éclaire trois lascards, un groupe de tocards 
    Pas avare, elle se laissa faire par leurs pouces en l’air. 

    (suite…)


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  • 01/08/2023 / 02/08/2023 – Vomir dans le Thalys Paris-Belgique / Chez moi on parle Néerlandais

    J’ai la tête vide. Quand je dis ça, vous pensez à un grand carré blanc où à un grand carré noir ? C’est comme l’analogie du verre, sauf que le mien est tout le temps noir.

    C’est vide de plein. Trop plein. Mais parfois ça déborde pas, alors toutes les interactions extérieures ricochent comme d’autant de pierres lancées lancées et la souffrance inévitablevroummmmmmmmmm
                       mmmmmmmmmm
                                  mmmmmmmmmmmm
                                                         //tlanch!
    brbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrtututrrrrrrrrbrrrrrr[inintéligible]

    Et moi j’espère que vienne le silence de mes sens. Mes yeux sont fatigués, ils ne demandent qu’à se fermer. Ma mâchoire serrée. Peut-être que je vais casser toutes mes dents si j’augmente la pression.

    Les minutes les plus longues sont les attentes fatiguées, les cinq dernières avant qu’arrive la fin d’un cours où ce maudit bus, celles pendant lesquelles on t’empêche de raccrocher ton tel ou de partir de chez ton pote relou ET les quelques minutes qui séparent l’obtention de la drogue de son achat. Einstein avait raison quand il parlait de la relativité du temps parce que la c’est toutes les époques qui se déroulent en même temps.

    J’ai les mains et la mâchoire toujours serrées.

    Le bus ça me détend. A part ma maman. On a pas la même rythme. Je me sens chez moi. Un pays entre deux. Mais lui-même. C’est tout à fait moi.
    On descend à Kalenbergstraat. Mais d’abord je dors.

    On a pas joué à un jeu. Touriste, pas touriste. Je pense que j’ai gagné mais on ne saura jamais. C’est pas comme si on était allées leur demander. C’est comme la maison. J’ai inventé tellement d’hypothèses sur la vie de notre hôte basées sur mes observations et ce qu’elle nous a indiqué. J’ai demandé à ma mère qui semblait fatiguée, bha non, c’est des observations, tu fais ça tout le temps aussi non ? Parfois. Oui mais tout le temps ? Elle non.

    Je suis fatiguée et pourtant il faut que je me saigne les veines ici pour pas mourir. Maman a dit qu’elle prendrait bien une douche. Ça a l’air reposant, une douche. J’en prendrais bien une si je ne devais pas écrire. C’est aussi une douche, mais sans nier le côté sensuel de l’écriture, face au ruissellement de l’eau chaude sur la peau, relaxant les muscles meurtris par une longue journée de marche y’a pas photo.

    On est descendues du bus et avons rejoint Dilbeek par un petit chemin et maman a sir que c’était agréable de pouvoir sentir l’odeur de l’humus et voir la verdure parce que chez nous il faut aller en forêt pour avoir ça. J’ai pensé que chez moi c’était normal, parce que chez moi on parle néerlandais. Mais je pense que elle aussi elle n’habite pas chez elle. On a grandi pendant qu’elle nous parlait d’ailleurs. Alors parfois je pense qu’on est deux SDF de cœur sous un même toit. On a retrouvé un refuge où il était possible de survivre. On est de la mauvaise herbe, ce qui reste quand le reste a fané. Mais ce n’est pas parce qu’une plante est là qu’elle s’épanouit. Parfois je regarde le caoutchoutier dans la salle de bain, avec sa feuille unique tendue vers la lumière, et je me dis que je partage avec lui quelque chose de plus qu’humain. 

    J’ai allumé ma clope sur le retour et le nonchalant ciel mitigé est tout d’un coup devenu très chalant et nous a accueilli ma mère, mes achats et mes clopes (le journal est mouillé) sous les trombes d’eau. En Belgique, tout est si lent est relaxant. J’ai dit à mon hôte que tout était tranquille, ou alors, c’était elle je ne sais plus, et l’une de nous deux a acquiescé. Le sujet était clos et sur ce nous sommes rentrées. Maman a peur de me déconcentrer mais l’on ne peut qu’accompagner quelqu’un qui vomit. Car c’est de ça qu’il s’agit. De diarrhée verbale, depuis hier. C’est l’air du Nord qui me rend mes sens . Peut-être aurais-je été un génie si j’étais née à Norveje. Mais je suis née à Dijon et je n’ai pour moi que la moutarde. C’est déjà pas mal. Je serais déjà morte sans ma saloperie de mauvais caractère.
    Nous avons écrasés nos mégots au même endroit et nous nous sommes silencieusement glissées dans nos chambres. Deux réalités bien distinctes qui se croisent et se côtoient tous les jours mais ont été condamnées à ne plus jamais être mêlées quand le Docteur a coupé le cordon ombilical.

    Au moment de prendre soin de moi je veux me peindre (j’ai écrit me pendre et barré, lapsus ?) de rouge, devenir un zèbre humain. Paint it red. Red of love. Paint of blood. Ça tombe bien l’amour j’en ai pour tout le monde mais pas moi. Je veux être belle. Je veux être mince. Je veux être le pendant entre la mort et la vie car c’est ce que je ressens au fond. Je suis déjà loin des gens, contagieuse comme une sorte de zombie. Je suis en marge.

     

     

    C’est mon nouveau normal.

    Le matin est tombé comme toujours. Avec l’humidité il fait froid le matin. Aucune motivation pour sortir. Rester dedans profiter du mauvais temps, maman a dit qu’elle faisait ça, mais chez elle. Mais ici moi je suis chez moi.

    Ici le temps se prête à rester chez soi. Gezellig. Ça me manquait le thé avec le ciel gris comme couverture.


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    Se construire en creux

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    Se construire en creux

    Tendances autodestructrices
    « C’est l’apanage des artistes »
    Je ne suis pas une grande autrice
    Mais j’ai, comme les plus grand, ce vice
    D’être une consommatrice

    Nous sommes tous consommateurs
    Le capitalisme à remis toutes nos horloges à l’heure
    Mais si dans les paradis artificiels je m’oublie
    Si j’essaie de me retrouver dans les paniers remplis

    C’est que je suis pleine de vide
    Je crois que j’ai été construit en creux

    Dans un corps qui a tout d’humain
    On a mis un cerveau qui n’aspire pas au lendemain.


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