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  • Hiro Arikawa – Au prochain arrêt, ôde aux petites lignes de train

    Critique de lecture : Hiro Arikawa, Au prochain arrêt, Actes Sud (2008)

    Traduction française du japonais par Sofie Rèfle

    Avis : 5/5

    Une lecture plaisante, qui se lit le temps d’un trajet en train. J’adore les recueils d’histoires courtes, mais j’ai d’abord été décontenancée car je pensais avoir acheté un roman. C’est finalement avec plaisir que j’ai découvert que ces histoires étaient toutes cousues de manière discrète mais habile – c’est là que l’on reconnaît le talent d’écriture d‘Hiro Arikawa. Finalement, l’auteur japonais nous livre un roman varié mais qui n’a rien de décousu – on pourrait dire qu’il à la forme unie et raccordé d’un train et de ses différentes rames, la forme rejoignant ainsi le fond.

    Chroniques d’un voyageur en train à destination des voyageurs-lecteurs.

    Prenant moi même souvent le train et ayant écrit sur des passages de petite ligne de train régionaux (TER lio occitanie SNCF) que j’emprunte tous les jours, j’ai été touchée de voir un livre se centrer précisément sur ce thème que je rêverais d’aborder. Nous donnant à voir la vie des différents passagers, l’écrivain semble exorciser le questionnement permanent des voyageurs réguliers de ces petites lignes de campagne. Toute personne ayant un jour pris les transports en commun sera amusée de remarquer que chaque heure à sa « faune », ses réguliers, ses habitués, son atmosphère, que les personnages, comme le lecteur, ont appris à connaître par cœur.  Les gares, tout comme le paysage de la ligne, font partie intégrante du tableau, voire semblent devenir des personnages à part entière dans certains passages, nous montrant combien la répétition de ces moments anodins de notre quotidien peut finir par en constituer un bloc important, tout comme les drames ordinaires se jouent dans des lieux ordinaires, que nous empruntons tous les jours.

    Lire aussi :
    Septembre 2023 – Dernier Ter Montpellier-Perpignan avant longtemps
    The train traveler (la voyageuse du train) – photodiary #1

    À mon sens, présenter comme pour un trajet un aller et un retour est le point fort de Au prochain arrêt, car c’est cet aspect qui permet d’unifier et de donner leur plein sens aux histoires présentées. Une autre réussite du roman à mon sens est de s’inspirer d’une ligne de train qui existe réellement au Japon (la ligne Takarazuka – Nishinomiya), ce qui permet au lecteur de faire ce « pélerinage » s’il en a envie et d’en découvrir de ses yeux les paysages décrits au fil des saisons. Finalement, c’est à se demander si le train ne jouerait pas ici un rôle symbolique : présentant des personnes parfois perdues dans leur vie ou à des moments de changement, que le train vient diriger, provoquer ou accompagner.

    Au prochain arrêt : introspection

    J’irais jusqu’à projeter un peu : je me suis toujours sentie entre deux mondes. C’est pourquoi j’aime autant les trains, qui font office d’entre-deux entre de périodes de mouvements et de décisions à prendre. Parce que c’est un endroit en mouvement dans lequel le passager n’a pas d’autre choix que de rester assis, il se fait le lieu idéal de l’introspection et de la méditation sur soi-même et l’existence – ainsi, celle qu’Hiro Arikawa écrit dans Au prochain arrêt fait office d’invitation pour le lecteur à faire de même. Mais après avoir posé le livre… On se dit qu’on s’arrêtera au prochain arrêt, pour se retrouver à faire l’aller-retour complet. L’invitation à s’arrêter dans notre quotidien occupé (peut-être pour prendre le livre) se situe dans le titre même.

    Un pépite propre à la littérature japonaise

    Au prochain arrêt réussi un tour de force que je n’ai jusque-là trouvé que dans la littérature japonaise : écrire un roman à l’atmosphère douce, nostalgique et quotidienne, qui vient pourtant aborder les sujets les plus mondains comme les plus sensibles. Il faut beaucoup de talent et de style pour arriver à écrire sur un sujet aussi banal qu’un train sans ennuyer le lecteur. Plein de sagesse et infiniment vivant, qui a lu Hiro Arikawa prendra désormais les transports en commun en regardant son écosystème autrement.

    Barbara Ferreres, 2024, tous droits réservés.

    Voir sur : GoodreadsBabelio


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  • The train traveler (la voyageuse du train) – photodiary #1

    Photographies de mes voyages en transports en commun, notamment le train, bus et tramways (ter occitanie, tgv inoui sncf, cts Strasbourg, Brussels, Leiden station, arriva nederland), avion (KLM)

    Barbara Ferreres – Copyright 2019-2021


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    À la lumière des lamparos

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    À la lumière des lamparos

    Cette histoire d’un soir, 
    Est la matrice d’innombrables heures débauchées 
    D’un groupe de jeunes paumés 
    A deux pas de la mer méditerranée 
    La vie va les séparer,
    Gardez pour l’instant le secret;
    Leur innoncence intouchée est protégé,par les pécheurs aux lamparos 
    Dont lueur d’espoir trompeuse piège qui ne supporte par le noir.

    Chut..!
    C’est le moment où le silence immobile de la nuit 
    Pousse les maraudeurs saoulés par la chaleur de l’ivresse 
    À rechercher sa fraicheur 
    Du village à sa plage,
    Ils se font poissons migrateurs 
    Dont le bruit raisonne d’autant plus fort qu’il est interdit, 
    Comme un scintillement d’écailles qui les trahit. 

    Ils imitent sans le savoir, 
    La danse macabre des insectes et sardines happés par l’éclairage artificiel 
    Tournant autour d’un répertoire d’histoires perpétuel
    Dont la lumière du jour éclatera le superficiel. 

    Aux rues éclairées se succède des chemins noyés dans l’obscurité
    Des jets d’urines derrière les maisons voisines, couverts par leurs rires
    Les champs de Sainte-Marie se succèdent
    Jusqu’à ce que se fasse sentir l’odeur de salé typique de ces rivages familiers et pourtant incessamment recherchés
     Inconscient des ravages du temps, il se fait toujours plaisant,
    Où rien n’existe après vingt ans. 

    Les flashs des portables sont d’autant d’éclairs, 
    Absorbés par la mer, 
    Qu’il était alors important, de pouvoir toucher des pieds le plus longtemps 
    De pouvoir toucher par tous les temps

    Je pense le vague à l’âme, 
    Aux lamparos qu’on observait pêcher 
    Sur la côté catalane
    Aveuglés par l’alcool, la lune, les étoiles, et leurs lumières rondes
    On refaisait un monde 
    Où l’on pensait se voir toujours, 
    De nos affaires alors ensablées, 
    Tout s’est évaporé. 

    La tiédeur du sable me rendait mélancolique 
    Je les voyait courir au loin, n’entendant déjà plus leurs discussions
    Peut-être percevais je déjà tous les indices
    D’une séparation plus profonde que les filets 
    Qui permettaient au passé de ressurgir en sécurité;
    Tout comme les plantes et les trous que l’ont ne pouvait pas voir, 
    La lumière du soir les a fait plonger dans le noir,
    De ces sentiers empruntés en secret 
    Cachette de ces chats qui eux nous voyaient venir 
    Et qu’on faisait fuir. 

    Seules nous ramenaient à la réalité, les rares fenêtres allumées
    Et la fraicheur tempérée de la méditerranée
    Dont les marrées ne sauraient effacer, 
    Les traces laissées par les garçons qui se coursaient,
    Pendant que les plus sobres nous guidaient,
    Véritables moniteurs de centre aéré  
    Je repense à la fierté mal placée, de laisser certains grelotter
    Au nom de la perpétuation de la tradition
    De ces explorations menées en secret 
    Du jour, bien gardées. 

    Les flashs de nos téléphones sont autant d’éclairs, absorbés par la mer
    Dont l’impuissance face aux roseaux, à l’eau, au vent, 
    Se fait encre indélébile sur des vêtements
    Abandonnés depuis longtemps. 

    Oui, ces lampes aux jets balbutiants 
    Noyés dans la lumière lunaire, 
    Entouraient le noir 
    De mes espoirs réfractaires
    Adepte de son aveuglement, je me noies encore dans le nectar,
    Des nuits où l’on se couche trop tard, 
    Elle est le gardien d’un présent toujours vivant, 
    Aidant à guérir les fractures du ceux qui pour qui le présent se décline à contre-temps
    Et conjuguent sans faute le passé au futur.

    Le drapé du soir, troué d’autant d’étoiles, que de traces laissées par nos balles; 
    Laisse encore s’échapper nos rires étouffés,
    Il est autant la voile des souvenirs d’un jour, 
    Que la toile dressée en hommage,
    Aux déambulations de jeunesse qui n’a pas d’âge. 

    J’ai beau être moi revenue,
    Mais les lamparos, eux, ne sont jamais réapparus.

    Barbara Ferreres – à la lumière des lamparos 
    2024 tous droits réservés, 66470 Sainte Marie la Mer


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  • Septembre 2023 – Dernier Ter Montpellier-Perpignan avant longtemps

    Je regarde le lac de leucate et je suis triste à crever.
    Je n’arrive pas à réaliser que je vais m’en aller. J’ai l’impression que je vais en crever. Que c’est pas possible que je retourne loin de tout ça.
    Avant, j’étais à Montpellier, mais c’est de la triche, c’est pas vraiment loin.
    Je repense à papa et ses histoires de pension comme si j’avais besoin de ça. Comme si je galerais déjà pas assez sans ça. Il faut qu’il rajoute sa touche. Je sais que c’est juste, mais ça m’emmerde.

    Je voudrais rester en Provence avec mes amis et ma sœur. Je suis toujours si loin. J’ai l’impression qu’ils se rapprochent et que je les perds. J’y ai contribué. Mais j’aimerais continuer de regarder avec eux la voie lactée. Il me semble injuste que les gens qui comptent dans ma vie soient tous loin de moi.
    Je regarde les Corbières et les Pyrénées, basses, avec leurs contours bien arrondis. Je repense à mon arrivée somnolée dans les Alpes escarpées. Tiffany qui me dit que ça sent la maison pendant que je me laisse bercer par le ronron du moteur. Je me rappelle avoir demandé pourquoi. C’est parce que les Alpes sont des millions d’années plus jeunes. Regarde, on voit encore les strates, et le dessus qui s’est cassé la gueule, rigole selena, au volant depuis Strasbourg. J’essaie d’imaginer les Pyrénées en train de pousser, détruisant tout sur leur passage, d’un coup comme une éruption. J’ai demandé si ça se passait comme une catastrophe naturelle. On m’a parlé d’endroit de friction des plaques, le truc niveau 4e, mais au final je n’ ai pas compris si l’avènement des montagnes que j’aime aujourd’hui s’est fait dans un désastre.

    A Port la Nouvelle, je vois cette infrastructure de béton moche qui m’avait tant impressionnée mon premier soir de voyage seule, dans le train de 17h17, que je n’ai plus jamais repris parce

    (suite…)

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  • 01/08/2023 / 02/08/2023 – Vomir dans le Thalys Paris-Belgique / Chez moi on parle Néerlandais

    J’ai la tête vide. Quand je dis ça, vous pensez à un grand carré blanc où à un grand carré noir ? C’est comme l’analogie du verre, sauf que le mien est tout le temps noir.

    C’est vide de plein. Trop plein. Mais parfois ça déborde pas, alors toutes les interactions extérieures ricochent comme d’autant de pierres lancées lancées et la souffrance inévitablevroummmmmmmmmm
                       mmmmmmmmmm
                                  mmmmmmmmmmmm
                                                         //tlanch!
    brbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrbrtututrrrrrrrrbrrrrrr[inintéligible]

    Et moi j’espère que vienne le silence de mes sens. Mes yeux sont fatigués, ils ne demandent qu’à se fermer. Ma mâchoire serrée. Peut-être que je vais casser toutes mes dents si j’augmente la pression.

    Les minutes les plus longues sont les attentes fatiguées, les cinq dernières avant qu’arrive la fin d’un cours où ce maudit bus, celles pendant lesquelles on t’empêche de raccrocher ton tel ou de partir de chez ton pote relou ET les quelques minutes qui séparent l’obtention de la drogue de son achat. Einstein avait raison quand il parlait de la relativité du temps parce que la c’est toutes les époques qui se déroulent en même temps.

    J’ai les mains et la mâchoire toujours serrées.

    Le bus ça me détend. A part ma maman. On a pas la même rythme. Je me sens chez moi. Un pays entre deux. Mais lui-même. C’est tout à fait moi.
    On descend à Kalenbergstraat. Mais d’abord je dors.

    On a pas joué à un jeu. Touriste, pas touriste. Je pense que j’ai gagné mais on ne saura jamais. C’est pas comme si on était allées leur demander. C’est comme la maison. J’ai inventé tellement d’hypothèses sur la vie de notre hôte basées sur mes observations et ce qu’elle nous a indiqué. J’ai demandé à ma mère qui semblait fatiguée, bha non, c’est des observations, tu fais ça tout le temps aussi non ? Parfois. Oui mais tout le temps ? Elle non.

    Je suis fatiguée et pourtant il faut que je me saigne les veines ici pour pas mourir. Maman a dit qu’elle prendrait bien une douche. Ça a l’air reposant, une douche. J’en prendrais bien une si je ne devais pas écrire. C’est aussi une douche, mais sans nier le côté sensuel de l’écriture, face au ruissellement de l’eau chaude sur la peau, relaxant les muscles meurtris par une longue journée de marche y’a pas photo.

    On est descendues du bus et avons rejoint Dilbeek par un petit chemin et maman a sir que c’était agréable de pouvoir sentir l’odeur de l’humus et voir la verdure parce que chez nous il faut aller en forêt pour avoir ça. J’ai pensé que chez moi c’était normal, parce que chez moi on parle néerlandais. Mais je pense que elle aussi elle n’habite pas chez elle. On a grandi pendant qu’elle nous parlait d’ailleurs. Alors parfois je pense qu’on est deux SDF de cœur sous un même toit. On a retrouvé un refuge où il était possible de survivre. On est de la mauvaise herbe, ce qui reste quand le reste a fané. Mais ce n’est pas parce qu’une plante est là qu’elle s’épanouit. Parfois je regarde le caoutchoutier dans la salle de bain, avec sa feuille unique tendue vers la lumière, et je me dis que je partage avec lui quelque chose de plus qu’humain. 

    J’ai allumé ma clope sur le retour et le nonchalant ciel mitigé est tout d’un coup devenu très chalant et nous a accueilli ma mère, mes achats et mes clopes (le journal est mouillé) sous les trombes d’eau. En Belgique, tout est si lent est relaxant. J’ai dit à mon hôte que tout était tranquille, ou alors, c’était elle je ne sais plus, et l’une de nous deux a acquiescé. Le sujet était clos et sur ce nous sommes rentrées. Maman a peur de me déconcentrer mais l’on ne peut qu’accompagner quelqu’un qui vomit. Car c’est de ça qu’il s’agit. De diarrhée verbale, depuis hier. C’est l’air du Nord qui me rend mes sens . Peut-être aurais-je été un génie si j’étais née à Norveje. Mais je suis née à Dijon et je n’ai pour moi que la moutarde. C’est déjà pas mal. Je serais déjà morte sans ma saloperie de mauvais caractère.
    Nous avons écrasés nos mégots au même endroit et nous nous sommes silencieusement glissées dans nos chambres. Deux réalités bien distinctes qui se croisent et se côtoient tous les jours mais ont été condamnées à ne plus jamais être mêlées quand le Docteur a coupé le cordon ombilical.

    Au moment de prendre soin de moi je veux me peindre (j’ai écrit me pendre et barré, lapsus ?) de rouge, devenir un zèbre humain. Paint it red. Red of love. Paint of blood. Ça tombe bien l’amour j’en ai pour tout le monde mais pas moi. Je veux être belle. Je veux être mince. Je veux être le pendant entre la mort et la vie car c’est ce que je ressens au fond. Je suis déjà loin des gens, contagieuse comme une sorte de zombie. Je suis en marge.

     

     

    C’est mon nouveau normal.

    Le matin est tombé comme toujours. Avec l’humidité il fait froid le matin. Aucune motivation pour sortir. Rester dedans profiter du mauvais temps, maman a dit qu’elle faisait ça, mais chez elle. Mais ici moi je suis chez moi.

    Ici le temps se prête à rester chez soi. Gezellig. Ça me manquait le thé avec le ciel gris comme couverture.


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